La nuit ne fut pas si réparatrice que ça car le studio en question était en fait un appartement que nous partagions avec 4 jeunes étudiants africains. Nous avions une cuisine en commun et un cabinet WC. A peine endormis, un grésillement vient nous chatouiller les oreilles et une odeur d'oignons frits fait frémir nos narines... Un des jeunes voisins se fricote un petit souper. Arrivent les trois autres et tous ensemble, ils font un boucan d'enfer. On est si fatigués, qu'on part dans un demi-sommeil agité... J'entends des petits rongeurs un peu partout...Notre chambre comprend deux petits lits, un lavabo et une douche. Bien suffisant mais au niveau de la propreté, c'était plus que douteux... Et je ne parle pas des WC... Et de la chaleur étouffante qui régnait en ces lieux... Mais, on voulait du "local", on l'a eu. Ne jouons pas aux Européens nantis !!
Au matin, avant de prendre une douche rafraîchissante, nous devons commencer par "chasser" les petits vers bruns qui sortent de l'écoulement. Et ça se répétera avant chaque utilisation de la douche ! Original, non ?
Nos amis nous ont prévu une matinée consacrée à un premier tour de ville. Quelle journée ! André reprend le volant et vive l'aventure ! Je pense que pour conduire à Abidjan, il faut être soit téméraire, inconscient ou aimer les risques et les sensations fortes ! Les pots d'échappement libèrent une fumée noire et dense. Des piétons jouent à la roulette russe en tentant de traverser la chaussée. Les passages cloutés semblent inexistants, même aux quelques rares endroits où il y en a ! Inutile de répéter que chaque voiture se faufile en klaxonnant bruyamment !
En tant qu'aide-chauffeur, Paulette essaie de prévenir son mari en annonçant les trous, les dépassements par la doite ou en troisième position par la gauche et de repérer par où nous passons pour faciliter le chemin du retour.
Ici, chacun prie chaque jour pour ses déplacements, pour ceux de sa famille et de ses voisins ! Faut l'avoir vécu pour comprendre !
Tous les principaux carrefours d'Abidjan sont animés et envahis par les vendeurs qui cherchent un client pour "faire affaire" avec des sucres en morceaux au détail, des boissons fraîches, des mouchoirs en papier, des allumettes, des lunettes à soleil, des montres, des ventilateurs, des accessoires pour voiture ou des articles de saison pour la rentrée scolaire, et, en période de fêtes de fin d'année, des sapins et des guirlandes de Noël ! Un véritable marché en plus de tous les petits et grands marchés de la ville.
Un détail amusant concernant les vieilles voitures délabrées qui sillonnent Abidjan : elles arrivent directement de France et auront une seconde vie en Afrique. Les Ivoiriens les surnomment malicieusement : "Au revoir la France" !!
En ce premier jour et ce jusqu'au dernier jour de notre séjour à Abidjan, nous vivrons au rythme de l'harmattan. Nos amis nous avaient "promis" un peu de fraîcheur pendant notre séjour et bien, rien de tout ça ! Nous découvrons les réalités d'une chaleur humide, lourde et d'une poussière qui s'infiltre partout !
Ensuite, nous partons pour le marché de viande de porc de Yopougon. Si je pouvais vous faire partager les odeurs, les discussions, les prises de bec, les cris, la musique, les rires, les klaxons de la rue !
Nous avons surtout été fascinés par le système de ramassage des petits bus pour le transport collectif de 12 à 15 personnes : il y a celui qui crie pour le trajet, celui qui hurle pour savoir qui va dans cette direction, celui qui rabat en fonction du chauffeur avec qui il est en relation, celui qui court pour trouver un dernier client, celui qui ouvre, ferme, court et encaisse le prix de la course avec des billets roulés autour de chaque doigt, plus, bien entendu, les nombreux passagers montant et descendant du véhicule !
Tout ceci se fait avec des "tourner sur route" à vous couper le souffle, des arrêts sans clignotant mais avec des coups de klaxon, des piétons adultes et enfants un peu partout, des charrettes poussées à bras d'homme, transportant des vivres, des ordures, de l'herbe et autres, plus de la poussière et des caniveaux fortement détériorés !!!... Si on veut de la vie, on est servi !
Dans un autre quartier, au grand marché d'Adjamé ou de Treichville, il y a en plus de tout ce que j'ai cité plus haut, tous les petits marchands installés directement sur ce qui devrait être le trottoir !
Après toutes ces émotions, nous décidons de nous arrêter dans un maquis (petit bar) pour y déguster une délicieuse bière africaine. Ensuite, on fait un nouvel arrêt dans un marché de fruits où nous faisons provision de mangues, bananes et ananas.
Nous sommes à nouveau dans la maison d'André et Paulette et profitons de l'air bienfaisant de leur gros ventilateur ! Comme nous connaissions le goût prononcé de nos amis pour les plats au fromage, nous avons emmené de Suisse, pour leur plus grand plaisir, un mélange de fromage râpé sous vide et 1 bouteille de vin blanc et ce soir, c'est moi qui suis préposée à la cuisine (j'avais acheté du pain dans la journée) et je prépare pour nous cinq : une fondue !! C'est merveilleux de se retrouver entre amis autour d'une bonne fondue ! Habituellement, nous mangeons ce plat typiquement suisse dans la fraîcheur de nos alpages mais ce soir, dans le salon des Schulé, il fait 32 degrés !!! Bien fait pour nous !!
Le lendemain matin, Paulette, Evelyne et moi commençons à trier tous les vêtements et chaussures d'enfants car nos amis, qui vivent depuis déjà un an en Côte d'Ivoire, savent où et à qui nous pourrons distribuer ces cadeaux, si précieux pour tant de familles.
Après une deuxième nuit plus calme et plus reposante, nous nous apprêtons à vivre une nouvelle journée en terre africaine ! Pendant le petit-déjeuner, Fatou, une souriante dame vient directement à la maison, vendre des légumes et des fruits. Paulette nous explique que parfois, sa bassine est si lourde qu'il faut l'aider à la descendre ou à la remettre sur sa tête !
Ce matin, nous allons, sans les Schulé, mais avec Ismaël, leur "homme de maison", faire une visite du grand marché d'Adjamé. Nous avons déjà beaucoup voyagé, sur plusieurs continents, mais jamais nous n'avons vu un marché de cette ampleur, avec une atmosphère si particulière.
C'est si vaste et si indescriptible que je ne sais comment m'y prendre pour vous faire vivre les 2 heures passées dans cet endroit !
Comme souvent en Afrique, l'ambiance est unique ! Des gens, partout des gens. Des vendeuses de fruits, de légumes, de poulets vivants ou à moitié étouffés sous la chaleur (c'est en plus un marché couvert !), des oeufs par centaines, des poissons de toutes espèces et de toutes couleurs, des coquillages, des stands de viande où les mouches sautent "à pieds joints" d'un morceau à l'autre, des femmes aux vêtements colorés, souvent leur enfant dormant dans leur dos, des odeurs indéfinissables, des bijoux, des étoffes magnifiques, des enfants qui se traînent à quatre pattes dans de l'eau nauséabonde, des épices, du bric à brac, des meubles, des chaussures par centaines, des petits meubles, de l'artisanat, du charbon, etc, etc.
Cet immense marché se prolonge encore à l'extérieur, dans toutes les rues environnantes et propose d'innombrables produits de toutes les couleurs et de tous les formats ! Vraiment trop compliqué à expliquer (dommage que je ne puisse vous transmettre quelques photos) !
Nous avons bien évidemment profité de faire quelques achats originaux à des prix plus que dérisoires
J'ai l'air d'insister un peu lourdement sur la chaleur mais je n'ai jamais vécu dans un climat aussi éprouvant, aussi longtemps. L'humidité est plus inconfortable que la chaleur elle-même. Parfois, je rêvais de me promener en maillot de bain sur la banquise !!!
Nous rentrons chez les Schulé pour le repas de midi. C'est notre brave Ismaël qui se met aux fourneaux et nous prépare un plat très ivoirien : de l'attieke (semoule de manioc) et un kedjenou de poulet (ragout) : délicieux !