Alors, en réponse à certains médisants qui prétendent que je postpose la suite de mon carnet à cause d'un exès d'abricotine pris en sa charmante compagnie ( je sais, je sais , frotte-manche je suis
) , sachez qu'il n'en n'est rien ..enfin ...pas vraiment , pas seulement quoi
Voici donc la suite
15 septembre : Voici venu le grand jour ! Nous nos levons à l’aube, avalons notre petit déjeuner et nous en voici en route pour le Congo. La frontière n’est qu’à 15 minutes de route. Le poste frontière est surprenant et grouille de monde, même à cette heure très matinale. ( bon, je sais, ce n'est pas très visible sur la photo )
Notre cher Daniel part muni de tous nos passeports vers de multiples petites guérites. A aucun moment nous ne devons nous y présenter en personne, hallucinant. Vu le temps des démarches, cela nous laisse tout loisirs d’observer les allées et venues et d’admirer la prouesse des enfants et de leur ………, sorte de vélo trottinette qu’ils utilisent pour transporter leurs marchandises.
Nous franchissons la barrière qui fait frontière et entrons dans le No mans land,
après quelques centaines de mètres, nous voici enfin au Congo. Je dis enfin parce que j’ai toujours rêvé d’aller un jour au Congo et m’y voici. Daniel recommence à courir d’une guérite à l’autre afin d’obtenir nos visas congolais, ce qui lui prends au moins une demi heure
Sorry, j'ai pas résisté
Paré de toutes les autorisations nécessaires, nous embarquons dans notre voiture du jour.
Le chauffeur, comme la plupart des congolais parle français. Nous serons ravis de sa compagnie, surtout au vu des événements de la journée, mais je raconterai cela plus tard, d’abord, le Congo et les gorilles. Nous roulons à travers la campagnes congolaise, les paysages sont à peu près les mêmes qu’en Ouganda
mais les villages traversés me semble bien plus pauvres et les gens moins souriant. La guerre qui a fait rage dans le pays laissé des traces et les gens y ont vécu et y vivent encore des événements douloureux. J’éprouve tant de peine pour eux et je souhaite qu’ils puissent un jour vivre en paix, mais cela semble encore bien illusoire. Les villages sont très animés et nous nous arrêtons de multiples fois pour prendre des photos
Je commence à m’inquiéter que nos ne soyons en retard au parc des Virunga où nous attendent nos rangers. Mais non, aucun problème, nous sommes les seuls touristes du jour et dans ces zones d’Afrique, la ponctualité n’est pas de mise. Nous arrivons à l’endroit où la voiture va nous déposer pour commencer notre marche vers le parc. Un ranger du parc est venu nous attendre et une petite bande d’enfants nous observent nous équipant en riant, cela doit leur sembler bien étrange tout cet attirail de randonneur alors qu’ils sont pied nus et juste vêtu de leur short et T-shirt . Daniel nous montre au loin l’endroit ou commencera l’ascension et je réalise qu’il va d’abord falloir marcher jusque là ; cela me semble bien loin, mais il faut y aller, alors en route ! La balade pour atteindre l’entrée du parc nous prend trois quarts d’heure. Les rangers et les pisteurs armés de leurs machettes nous attendent tranquillement et ne semblent pas très intéressés par notre arrivée. Au bout d’un bon quart d’heure, ils se décident à prendre le départ, lorsqu’un l’un deux, regardant le ciel d’un œil mitigé, court chercher son imperméable. Cela n’annonce rien de bon, et en effet le ciel semble s’obscurcir. Espérons que la pluie n’arrive pas trop vite car elle risquerait de rendre les chemins glissants. Nous partons en file indienne par un petit chemin qui nous amène au pied de la montagne. Jusque là cela va, commence ensuite l’ascension proprement dite, j’espère secrètement que les gorilles auront décidé de ne pas monter trop haut car la pente est raide
et qu’au but de quelques minutes, je prends douloureusement conscience de ma piètre condition physique. Alors que les autres semblent gravir la peine sans effort, je souffle comme un âne. Les rangers nous ont dit que l’on pouvait demander à faire des poses, mais je ne veux pas perturber mes compagnons trop souvent par des arrêts répétés et je mords sur ma chique autant que possible. Très prévenant, mes compagnons, se rendant compte de ma difficulté proposent eux-mêmes de s’arrêter à plusieurs reprises et je leur en suis reconnaissante. Alain a quelques problèmes de lacets et les petits arrêts pour les renouer me permettent de souffler quelques instants, je n’avais jamais pensé à bénir des lacets, mais là c’est le cas. Les paysages sont fabuleux et malgré l’effort, j’en jouis pleinement et cela me motive à continuer .Au bout d’une bonne heure de marche nous atteignons la forêt de bambous ou vivent les gorilles. La pente s’accentue très fortement et j’ai beaucoup de peine à grimper, si bien qu’un ranger me taille une canne dans un bambou. Quel bonheur, cette canne me facilite l’ascension mais l’effort est intense. Tout d’un coup les rangers s’arrêtent …auraient ils repéré les gorilles ? Malheureusement non, ce sont des pisteurs qui redescendent , ils étaient parti tôt le matin afin de localiser la famille de gorilles et les nouvelles ne sont pas bonnes, la famille semble être très haut dans la montagne . Tout à mon angoisse d’apprendre cette nouvelle, je profite de l’arrêt pour distribuer des barres chocolatées que j’avais emportées. Nos rangers semblent ravi et les dégustent avec délices et je dois dire que nous aussi. Après quelques moments de palabres avec les pisteurs, les rangers nous annonce qu’ils ont repéré une autre famille de gorilles plus proche et que nous allons bifurquer ; je suis aux anges. Il s’agit de la famille Rugendo, qui signifie « voyageur » ; les familles de gorilles sont appelées du nom de leur mâle dominant, le silver back. Je déchante un peu quand nous quittons notre petit sentier et nous enfonçons à travers la forêt que les pisteurs dégagent à la machette pour nous frayer un passage, mais la marche reste difficile et nous nous empêtrons dans les ronces, escaladons des troncs d’arbres, cela devient vraiment sportif, mais finalement amusant. Et tout d’un coup, au détour d’un tournant, ils sont là ! L’émotion m’envahit. Nous sommes accueillis par un bébé gorille qui semble ravi de nous voir arriver et manifestement il a très envie de jouer avec nous.
Sorry pour la qualité des photos, mais ce n'est vraiment pas facile , trop peu de lumière dans la forêt de bambous
Toute sa famille fait la sieste et il devait s’ennuier, nous sommes donc son divertissement de la journée. Malheureusement, les rangers le repousse car ils ne veulent pas d’un contact physique entre les gorilles et les humains pour les protéger car les gorilles sont très fragiles aux maladies humaines. Cela me fait de la peine de voir ce petit bonhomme si dépité. Réveillée par notre intrusion, quelques femelles se rapprochent et décident d’aller fouiller nos sacs que nous avons déposés au pied d’un arbre sous la garde d’un des rangers .Notre pauvre ranger a bien du mal à protéger nos sacs de la curiosités de ces dames gorilles . Tout à notre bonheur, nous lui laissons la responsabilité des sacs sans trop nous inquiéter de leur sort. Le petit pitre en a décidément marre de la sieste et commence toute une série d’acrobatie pour tenter d’intéresser les autres gorilles, mais peine perdue, ils dorment tranquillement, ouvrant à peine un œil pour nous observer. Apparemment la confiance règne ! Nous observons chaque membre du groupe et chaque découverte nous apporte son lot de ravissement. Notre petit préféré tente à présent d’escalader un arbre, sans succès, le voici qui tombe et roule sur lui-même, guettant bien que nous le regardons et il en rajoute des couches, le garnement.
Nous découvrons un autre juvénile dans un arbre, non loin , une femelle dort paisiblement avec son bébé lové contre elle et puis nous apercevons enfin le silver back, endormi un peu plus loin.
Nous nous rapprochons discrètement pour ne pas réveiller son altesse. Il est énorme et nous sommes impressionnés. Quand le rangers nous annonce que l’heure de visite est presque écoulée, j’ai l’impression que nous venons d’arriver tant le temps est passé vite.. ; et Rugendo dort toujours, j’aimerais tant le voir se lever et je le dit au rangers qui, regardant sa montre, me dit que cela ne devrait plus tarder. Incroyable comme les rangers connaissent bien « leurs » gorilles car effectivement, Rugendo commence à se réveiller et le voici bientôt debout, dans toute sa splendeur. Il nous regarde bien en face à 10 mètres de nous, immobile, superbe. Et puis, le voilà qui se dirige droit sur nous, nous toisant de toute sa hauteur, nous qui nous sommes fait tout petit devant lui mais son regard est chaleureux et il passe à un mètre de nous, paisiblement
et part dans la montagne entraînant dans son sillage toute sa troupe et nous les regardons s’éloigner dans un dernier moment d’émotion.
Nous restons encore quelques instants figés sur place, comme pour retrouver nos esprits après la magie de ces moments passés en compagnie des gorilles et puis, non sans un dernier regards vers la montagne, nous entamons notre descente vers la vallée . La descente est bien moins fatigante que la montée mais nous ne sommes pas au bout de nos peines car le vent vient de se lever, annonciateur d’orage et nous avons beau presser le pas, nous sommes encore bien haut dans la montagne lorsque arrive la pluie, d’abord quelques grosses gouttes et puis très rapidement, c’est le déluge . Très rapidement, le chemin se transforme en torrent et la descente prend un air d’apocalypse. J’ai l’impression que je vais mourir tant je suis transpercée pas la pluie.
Mon fin K-way m’a protégé quelques minutes mais très vite il me gêne, l’eau s’est infiltrée dans mes vêtements et me coule de partout. Mes chaussures de marche, gonflée d’eau me rendent la marche pénible
Enfin nous arrivons dans la plaine mais il nous reste à parcourir les quelques kilomètres qui nous séparent de la voiture. Et cette pluie torrentielle qui ne s’arrête pas ! Il semble que je vais boire le calice jusqu’à la lie. De plus, un besoin pressant se fait sentir depuis quelques temps et il n’y a nulle part de commodité ni d’endroit isolé, il faut attendre. Et, cerise sur le gâteau, mes compagnons de route qui, eux, n’ont pas le même problème s’arrêtent où bon leur semble. Je maugrée intérieurement et pas seulement intérieurement d’ailleurs
. Le long du chemin, les populations locales rient en nous voyant passer en si piètre état, mais j’ai du mal à partager leur enthousiasme Enfin la voiture est en vue et la pluie diminue, elle s’arrêtera quelques centaines de mètres avant que nous n’atteignions notre véhicule. Avec l’impression d’être passée dans la machine à laver, je me précipite dans la voiture et j’y enlève mes chaussures et mes chaussettes détrempées. Malgré une température certainement agréable, je grelotte et je n’ai plus qu’une seule envie, une douche chaude. Mais la route est longue avant de rejoindre notre confortable petit guesthouse. Daniel arrive enfin, complètement saoul, il a passé sa journée à boire avec les villageois. Si j’ose dire, c’est vraiment la goutte d’eau de trop
. Heureusement, le chauffeur est sobre, c’est déjà ça. Pendant tout le trajet, Daniel radotera des phrases sans queue ni tête et si, dans de bonnes conditions, cela aurait pu m’amuser, là vraiment, je plafonne. Mon humour semble s’être noyé. Je ne résiste quand même pas à une franche tranche de rire collective en voyant Daniel essayer d’enfiler son K-way par la manche. Un moment d’anthologie ! Avec nos vêtements trempés et Daniel dans cet état, nous renonçons à nous arrêter au marché comme nous l’avions prévu et nous regagnons la frontière, effectuons à nouveaux les démarches d’immigration. . Nous discutons quelques instants avec un jeune policier congolais qui nous fait part de ses craintes quand aux prochaines élections et à la situation politique dans son pays. Nous espérons sincèrement qu’un jour ce pays retrouvera la paix après tant d’année de guerre et de souffrance .Nos papiers sont prêts, nous quittons le Congo. Les locaux rient sous cape en voyant Daniel tituber dans le no man’s land. Encore quelques kilomètres et je pourrai me réfugier sous la douche, moment d’immense bonheur qui me remet d’aplomb et me permet de me remémorer les magnifiques souvenirs de la rencontre avec les gorilles qui restera à jamais gravée dans ma mémoire.
Souvenir de notre petit bout de chou , en espérant que la vie lui soit douce et que les rangers pourront le protéger