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Vu les relents d’égouts, il est heureux qu’on ne passe pas la nuit à Kom Ombo et quand tout le monde est revenu a bord, nous reprenons la navigation.
Après manger, je monte admirer le Nil la nuit sur les pont supérieurs et je tombe sur le « pacha » en train de bricoler sur l’antenne radio du bateau. On sait tous que pour bricoler, deux mains sont notoirement insuffisantes, en Egypte comme ailleurs ! Je prête une main salvatrice au capitaine pendant qu’il resserre les boulons et en remerciement il me propose de prendre un « chai », un thé, ce qui évidemment ne se refuse pas ! Dans la cabine de pilotage, il envoie son « boy » faire deux thés puis il m‘offre une clope que j’accepte, on s’assied à l’extérieur de la cabine de pilotage et on devise tranquillement … Et oui, malgré ses 20 mots d’anglais et mes 2 mots d’arabe on arrive à communiquer !
On commence par le classique « Where are you come from / Oh, France very good / Jacques et Bernadette Chirac very good » En cette époque de seconde guerre du Golfe, le président français s’étant violement opposé aux USA et aux Britannique peu de temps auparavant cette appréciation n’est guère surprenante ! Pas plus que les « Bush and Blair : No good : Big problems ! » Je m’avoue plus surpris lorsqu’il me sort « Schroeder very good too » car si effectivement, le chancelier allemand à suivi Chirac dans son refus de la guerre, donner son nom n’est pas forcément évident !
Histoire de parler d’autre chose, je le « branche » sur son métier, je sais déjà qu’on ne devient pas « pilote sur le Nil » car c’ est une caste dont la charge se transmet de père en fils depuis la nuit des temps, et alors que je lui montre ma surprise sur le fait qu’on puisse naviguer malgré l’absence totale de lumière il me fait comprendre qu’il a la carte du fleuve dans la tête, qu’il connaît le moindre îlot et le moindre haut fond de cette partie du Nil … Puis nous nous taisons, buvant et fumant et, en ce qui me concerne, appréciant simplement le moment...
Après un petit moment je le remercie et rejoint ma famille à la cabine. Quand nous nous réveillons le matin suivant, nous sommes amarré aux quais d’Assouan.
JOUR 5
Nous entamons la journée par la visite de la carrière de granit de la ville, d’où proviennent de nombreuses parties des temples égyptiens. Il y a ici ce qui aurait du être le plus grand obélisque d’Egypte, une énorme aiguille de pierre de 42mètres de longueur déjà taillé sur 3 faces et qu’il ne restait plus qu’a dégager du sol lorsqu’une fissure probablement due a un coup mal porté vint ruiner tout le travail … Il du y avoir quelques ouvriers de jeté aux crocos !
Un petit tour d’autocar plus tard et nous voilà à l’extrémité égyptienne du lac Nasser, sur le « nouveau » barrage d’Assouan, édifié dans les années 1970 grâce aux liens noués avec l’Union Soviétique. ( Il y a d’ailleurs un monument dédié à l’amitié entre les deux pays, typiquement « soviético-guerre froide » : 100% béton et ciment ! )
Encore quelques kilomètres et nous voguons sur le lac Nasser sur un petit bateau piloté par quelques Nubiens ( l’ancienne Nubie est aujourd’ hui la région Sud de l’Egypte) voguant vers l’île d’Agilkia où se trouve le temple de Philae.
Ce temple autrefois dédié à Isis, fut bâti par les Ptolémée au début du Ier siècle mais après la construction du premier barrage d’Assouan par les Anglais en 1894, le temple se retrouva en partie sous les eaux pendant 10 mois par an et, au début du XX ème siècle, la visite de Philae se faisait … en barque ! A la fin des années 1960, le projet de nouveau barrage risquant de détruire définitivement le temple, il fût sauvés des eaux grâce a l’entêtement de Christiane Desroches Noblecourt et à l’Unesco. Entre 1972 à 1980, le temple fut démonté pierre par pierre puis reconstruit sur une petite île, hors d’atteinte des eaux …
L’arrivée en bateau permet d’admirer longuement l’îlot surmonté par le superbe temple. Une fois dans la cour, les traces noires sur les colonnes témoignent des différents niveau des eaux. Sur un mur extérieur, un immense bas-relief représentant Isis à été consciencieusement martelé mais il reste d’autre impressionnantes représentations des dieux qui n’ont pas été touchés. A l’intérieur, des centaines de sculptures ornent les murs.