9 décembre. Quatrième jour.
Le rythme du matin est pris. Il fait nuit noire lorsque j’ouvre un œil. Le réveil n’a pas encore sonné. Il est presque 4h00.
Dehors, des milliers d’étoiles me souhaitent le bonjour. Il va faire beau. Et chaud.
Quand on voyage seul avec une divinité, on lui parle : « BFK, merci pour les trois léos. Maintenant, je rêve de faire LA photo classique d’un beau chat couché sur une branche d’arbre, au-dessus de moi. Si possible avec un impala en lambeaux qui pendouille sur la branche ».
Je n'ai pas dû être assez précis dans ma description, une fois encore. Mais mon quatrième tacheté m’attend tout de même sur une branche. Patiemment. Il est tout juste cinq heures lorsque je le découvre. Je le vois bien, à une dizaine de mètres de la route, mais de là où je suis, un feuillage épais m’interdit de faire des photos claires. Assez vite, en scrutant aux jumelles, je distingue des lambeaux de chair sur la branche. Il a une proie.
En fait, il suffirait que je sois quelques dizaines de centimètres plus haut pour avoir une vue parfaite, mais sortir le corps de la voiture sous le nez d’un léo n’est pas dans mes options.
D’autres véhicules s’arrêtent. Une vingtaine de minutes passent. Pour moi, la tactique est claire, je ne bouge pas tant que le léo ne bouge pas. Je suis prêt à passer la journée s’il le faut.
En fait, après une vingtaine de minutes, des moteurs se mettent en route autour de moi. Des voitures manoeuvrent. On s’interpelle :
- Des lions, qui arrivent de l’autre côté de la route !
J’ai le bon réflexe. Au lieu de bouger pour chercher les lions, je colle mon œil dans le viseur et je reste sur le léo.
Bingo. Il a senti les maîtres des lieux arriver. Il saisit sa proie, se lève… Mise au point manuelle. Je déclenche…
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… et il disparaît dans le maquis.
L’action a duré moins d’une seconde. Je n’ai eu le temps que de prendre une seule photo. Mais le regard inquiet du léo raconte bien l’histoire.
Les lions sont maintenant autour de la branche basse et une lionne flaire l’endroit où était posé l’impala.
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Soudain, j’entends de terribles feulements en contrebas de la route. Sans rien voir. Je pense que le léo est tombé nez-à-nez avec une lionne et qu’ils se sont expliqués. Grosse frustration d'être à quelques mètres d'une telle scène et de ne rien voir.
Les lions, un mâle et deux lionnes, se couchent sous les arbres. Une seule d’entre elles est à portée d’objectif. Est-ce parce qu’elle a déjà été manipulée par les humains qu’elle est moins craintive ?
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Comme d’habitude, je reste sur les lieux longtemps après le départ du léopard. Je sais qu’il est quelque part entre moi et la rivière, et qu’il va devoir retraverser la route à un moment ou un autre. J’arpente ce petit tronçon de la « leopard road ». En vain. Soit il a traversé dans mon dos, soit il s’est éloigné des lions et s’est couché pour le reste de la journée…
J’ai tout de même le plaisir d’observer un aigle de Wahlberg posé en bordure de route :
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A 9h00, alors que le soleil est déjà très proche du zénith, je décide de quitter les lieux. Il fait une chaleur étouffante et il est peu probable qu’un léopard parte en balade dans ces conditions.
Je roule vers le nord. Après la pause-primates à l’aire de pic-nique, je continue vers le nord. La zone humide au confluent de la Sabie et de la Sand est peuplée de familles d’éléphants. J’en rencontre parfois. Je les suis toujours aussi longtemps que je peux, et toujours avec le même plaisir…
Ici, une scène touchante d’un très jeune éléphanteau en train de franchir un obstacle en brousse. On voit, sur la troisième image, comment sa mère attentive l’aide d’une poussée de trompe :
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Des éléphants, j’en avais vu beaucoup plus à vrai dire lors de mon séjour à Shingwedzi, dans le nord du Kruger. (voir le carnet « Mystérieux Kruger). Et j’en verrai beaucoup aussi (et de très près) dans quelques jours, lorsque je descendrai vers Berg-en-Dal, dans de bien meilleures conditions photographiques.