Et c’est ainsi qu’au fil des heures passe la journée. De rhinos en éléphants et d’éléphants en rhinos…
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Avec un martin-pêcheur malachite bien coloré pour changer provisoirement de code couleur
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mais toujours sans léo, que j’ai dû laisser définitivement sur la Sabie River, je suppose.
Les rhinos n’étant pas une denrée rare, je tente quelques expériences photographiques.
Classique
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Plus tordu : la technique du zoom avant à vitesse lente (ici 1/13 de seconde), qui m’a été inspirée par quelques fantastiques images du grand photographe Greg du Toit.
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J’ai intitulée celle-là « Rhino solaire », avec l’envie de symboliser l’énergie gigantesque qui se dégage de ces animaux, pourtant placides la plupart du temps. (La centaine d’autres de la même série, je les ai intitulées « direct poubelle » !)
Je reprends la route en fin d’après-midi, toujours en slalomant entre les familles d’éléphants. Le ciel est voilé mais pour une fois, j’ai des éléphanteaux judokas dans un décor dégagé. J’en profite :
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Et les deux mêmes, un peu plus loin, sous une lumière différente
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Après les jeux, le réconfort d’une bonne tétée
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La BFK m’a permis d’observer, durant ce séjour, de nombreux caméléons. Animal que je n’avais jamais vu auparavant. Je me demande si c’est la région ou la saison qui était propice.
La difficulté avec les reptiles, c’est qu’ils sont mal mis en valeur si on les prend en plongée depuis la portière de la voiture.
Mais celui-là est trop beau. Je craque ! Je descends de voiture, ce qui est strictement interdit dans le Kruger, et je m’allonge par terre, remettant ma vie entre les mains de la BFK. Bonne fille, elle accepte de retenir ses lions, ses léopards et surtout ses éléphants le temps que je fasse une série sympa.
Je remonte intact dans la voiture.
Et pas mécontent du résultat photographique:
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Voilà, c’est presque fini. Mais avant de vous remercier de m’avoir suivi durant ces 11 jours, je dois m’acquitter d’une promesse. J’ai une histoire à vous raconter. La toute dernière histoire de la BFK.
Elle se passe dans l’après-midi de cette journée éléphanto-rhinocéresque. A l’heure où le soleil écrase le bush. Au point d’eau, plus rien ne bouge, sinon quelques insectes qui bourdonnent dans la brume de chaleur. Sous le rebord de mon chapeau, je sens mes paupières qui tombent. Envie de sieste.
Plusieurs familles sont là. Un peu déçues de ne voir que des rhinos endormis. On m’interroge. Je la joue détaché, un rien frimeur. Genre, « je suis un intime de la BFK, mais ça demande quelques sacrifices… » « Oui madame, je suis là depuis cinq heures ce matin… oui, j’ai vu des éléphants et des rhinos en grand nombre… mais oui, bien sûr monsieur, c’est mieux de se lever tôt… Non, je ne suis pas patient. Juste passionné. »
D’un coin de la cache, je vois un père de famille s’approcher de moi. A son air intimidé et à son modeste bridge Panasonic, je devine qu’il est impressionné par mon matériel et qu’il va s’intéresser à ma quête. Je devine aussi que, comme bien d’autres touristes rencontrés ces derniers jours, il va vouloir me montrer ses meilleures photos.
Je prépare mon sourire faussement modeste et mes phrases toutes prêtes pour le complimenter sur ses images qui seront, forcément, mal cadrées, ou mal éclairées, ou les deux. Mais chacun a droit à sa part de Kruger…
Avec un petit rictus timide, il engage la conversation. Comme les autres. Depuis quelle heure je suis là ? Ce que j’ai vu ? Si je suis un professionnel ?
Et puis, après avoir pris une grande inspiration, il se lance:
- Vous avez déjà photographié des léopards.
Je jubile. « Oui, quelques uns… »
J’aurais dû me méfier de son sourire heureux… Car lui, en me tendant son Panasonic : « Qu’est-ce que vous pensez de mes photos ? Je les ai prises ce matin… »
La cache se serait-elle effondrée sous le poids de 25 éléphants que je n’aurais pas été plus écrasé !
Là, sous mes yeux, sur l’écran de son petit bridge, mon touriste affiche une photo magnifique, parfaitement éclairée et dans un décor somptueux de rochers couleur d’argile, de.... deux bébés léopards !
Je ravale ma salive. Et dans un état semi-comateux : « Oui, oui, elle est belle… »
« Attendez, j’ai toute une série ! »
Noooooooooooooooooonnnnnnnnnnn !!!
C’est son premier safari dans le Kruger, et il en a « toute une série » !
Et quelle série ! Les deux chatons, qui peuvent avoir six à huit semaines, livrés à eux-mêmes pendant que la mère doit être à la chasse, qui jouent et font des mines sur des rochers et un tronc d’arbre, à l’heure matinale où la lumière est la meilleure, à moins de dix mètres de la route. En plus c’est bien cadré et techniquement au point.
- C’était où ?
- Près de Pretoriuskop.
A plus d’une heure de route.
Evidemment, je pense immédiatement à sauter dans ma voiture. Mais à quoi bon ? Je ne connais pas l’emplacement exact de la tanière. Les léopards déplacent leurs petits fréquemment, et les chances que je tombe sur ces deux-là par hasard sont infinitésimales… Et de toute façon il est déjà tard.
Sous le choc, le Chris Jek ! KO debout.
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Depuis, j’ai beaucoup réfléchi à cet épisode, survenu au dernier jour d’un séjour que j’avais entièrement voué à la quête du léopard. D’un seul coup, l’existence même de la BFK m’a parue incertaine. Ou alors il y avait un message, quelque chose à comprendre, une leçon d’humilité à recevoir…
Comment être sûr, avec une Fée?
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