N° 13 Poisson faucon
Départ le 22 juin de Roissy vers 23 h 30. Comme à mon habitude, je voyage ultraléger : mon sac de plongée accuse 23 kg sur la balance, le matériel photo étant rangé dans un sac pour la cabine. Au contrôle de sécurité, comme à chaque fois, je dois tout déballer et expliquer que je fais de la plongée et de la photo sous marine ce qui explique la présence de tous ces objets dans mon sac.
L’avion a du retard, je prends enfin place coté allée. S’installe près de moi un type costaud qui prend tout l’accoudoir, sa copine prenant place près du hublot. L’avion décolle, l’équipage nous sert à dîner, puis je me prépare pour une courte nuit de sommeil impérative car demain je plonge. Je m’endors quand soudain mon voisin glisse ses bras sur moi, sa tête se posant sur mon épaule. Je le repousse vigoureusement en m’écriant « non mais ça va pas non ». Il se tourne de l’autre côté sans s’excuser, quel manque de savoir vivre. Vous allez sûrement trouver que je ne suis pas sociable, c’est sans doute un peu vrai mais là j’ai trouvé qu’il exagérait ce…
! Par deux autres fois au cours de la nuit mon cher voisin a pensé que je devais être aussi confortable que l’ours en peluche de son enfance. Par deux autres fois je l’ai poussé sans ménagement… ours sûrement, peluche certainement pas.
Bref après cette nuit mémorable et sans sommeil, je débarque vers 5 h 30 du matin dans l’aéroport d’Hurgadha et erre tel un zombie. Je prends une bouteille de gin au duty free pour les apéros du soir et rejoins la navette qui va nous amener au bateau. Je suis d’une humeur de rhino noir. Après 40 minutes de minibus, nous arrivons à la marina. Les installations ont bien changé depuis mes premières croisières égyptiennes à la fin des années 1990. Nous marchions alors dans des cailloux avec nos sacs jusqu’au bord de l’eau puis les entassions dans un zodiac qui nous menait jusqu’au bateau. Désormais on emprunte un superbe ponton en bois jusqu’au bateau. Puis on embarque en marchant sur une planche pas très large qui fait le pont entre le quai et le bateau. Je marche sur la planche en faisant attention à ne pas prendre le bain du matin. Bruno, responsable de plongée et guide moniteur nous accueille. Il nous conduit ensuite à nos cabines. Pour cette croisière je suis logé sur le pont supérieur et partage une cabine avec David un plongeur belge très sympa. David m’annonce que je vais être tranquille puisqu’il a décidé de dormir dehors sur le pont.
Le bateau s’anime doucement, des plongeurs sont arrivés la veille et pendant toute la nuit. Il fait déjà chaud. Pas le temps de dormir, j’ai beaucoup de chose à faire : me changer, ranger les quelques vêtements pour la semaine, préparer le matériel de plongée, préparer et tester le matériel photo…
Je demande à Bruno la température de l’eau pour décider comment « m’habiller ». Comme elle est à 26 °C environ, je garde le haut de la combinaison et laisse mes « dessous » en néoprène (souris) dans le sac. Pour cette croisière j’ai opté pour une bouteille plus grande de 15 litres (le bloc standard fait 12 litres) car :
- faire de la photo accroît la consommation d’air,
- beaucoup de plongées sont profondes et je n’ai pas envie « d’économiser ».
Je teste ensuite le caisson accroché par un bout (il faut prononcer le t à la fin du mot) de bonne longueur que je plonge dans l’eau à partir de la plate-forme arrière du bateau. Le caisson est bien étanche. Je teste le flash dans la cabine pendant un bon quart d’heure avec un succès aléatoire avant de m’apercevoir que je n’ai pas bien branché la fibre optique… dans la suite des livres pour enfants je vous propose Oui-Oui s’essaye à la photo sous-marine
! Puis je constate que le mode live view de l’appareil ne marche plus. J’ai dû appuyer sur un mauvais bouton. Avant d’allumer l’ordinateur pour décrypter le mode d’emploi sûrement encore écrit par des ingénieurs, je demande à David, exceptionnellement présent dans la cabine s’il a une idée du réglage à faire. David m’envoie vers son copain Vincent qui possède un modèle de la même marque. Malheureusement Vincent ne se souvient pas du réglage mais est preneur de gel de silicone si j’en ai. Bref me voilà parti, pour déchiffrer le mode d’emploi avec mon esprit très embrumé.
Après le petit-déjeuner, nous nous plions aux formalités administratives habituelles (vérifications des niveaux de plongée, certificats médicaux, assurances, engagements de respecter les règles égyptiennes de plongée contrôle des passeports par les autorités militaires…) puis quittons la marina. Une courte navigation nous amène sur un site pour effectuer notre plongée de réadaptation. J’avise un plongeur sans cheveux et lui demande s’il veut du silicone maintenant. Devant son air stupéfait je réalise l’incongruité de ma proposition et comprends que ce n’est pas Vincent…
Vers 10 h 00, Bruno nous fait le briefing pour la première plongée et constitue les palanquées (groupes de plongeurs plongeant ensemble). Je plonge avec Bertrand et Arnaud qui prennent aussi des photos. Dans les livres et les formations il est préconisé de discuter avec les personnes avec qui on plonge pour connaître leur expérience et leur vécu.
En l’occurrence cette fois je suis complètement dans le gaz et ne pose aucune question. D’ailleurs discuter n'évite pas les surprises : entre le plongeur qui se faisait mousser et gonflait son CV (et moi par la même occasion), et les plongeurs de grande expérience que j’ai laissés filer comme des torpilles alors que mon alarme de profondeur indiquait que nous avions plus que dépassé les limites légales locales… on rencontre parfois du grand n’importe quoi.
Une fois le briefing terminé nous nous habillons. En enfilant ma combinaison je me trouve tout engoncé et je me dis qu’elle a encore rétréci (c’est forcément la seule et unique raison et je n’en vois pas d’autre, non vraiment pas.). Comme je mets plus de temps qu’une mariée à me préparer, mes deux compères sont déjà dans l’eau à m’attendre. Je me presse et saute à l’eau, le masque encore tout barbouillé de dentifrice de couleur verte (c’est un excellent moyen d’éviter la buée). À travers la vitre maculée de vert, j’entrevois Bertrand qui me fait le signe OK. Je lui réponds OK et c’est enfin parti, il est 10 h 47. Je profite de la descente pour finir de nettoyer mon masque, sécuriser l’appareil photo sur un mousqueton, allumer le flash et régler l’appareil. J’avise une raie à points bleus parfaite pour un premier test. Je déclenche, le flash part à pleine puissance et m’en excuse auprès de la pauvre raie. Je n’y comprends rien. Comme je suis peu versé dans la technique, lors de mon achat dans la boutique j’avais bien demandé au vendeur si le TTL fonctionnait avec la fibre optique. Il m’avait montré, test en direct à l’appui, que cela marchait.
Du coup face au résultat affreux, je règle le flash en manuel et obtiens une belle photo… complètement sous exposée. Je grogne dans mon détendeur. Comme mes deux compères ont un peu progressé, je laisse la raie tranquille et poursuis. Pour bien faire je devrais me poser faire des essais avec un mètre ruban, varier les ouvertures… bref au moins 20 minutes de tests que je ne peux pas imposer à d’autres…
Je persévère avec des essais plus mauvais les uns que les autres. Cela commence très fort. Je prends un poisson cocher qui passe à côté de moi mais ne suis pas satisfait du résultat.
N° 14 Poisson cocher